Mon salon, à moi, de l’agriculture (5)

17 février 2011

 

 

LABOUR

Avant de se coucher,il a ferré l’oeillon* *l’aiguillon
Préparé les charreux*, les chaînes, les timons. *support arrière de charrue
Il a fermé les yeux pour une courte nuit,
Car demain, dès l’aube, ce serait la charrui…* *charrue
Et puis, dès le réveil, il a chaussé les bottes
Etalé sur du pain, du beurre de la motte,
Bu un bol de lait frais et saisi son béret.
Dans la douce étable – dehors, il fait frisquet,
I l a mousu* en hâte ses bêtes les plus fortes, *trait
Les a liées au joug sur le seuil de la porte
Et les voilà partis dans le clair du matin
Les roues de la charrue geignant sur le chemin.
Par sa femme conduite à l’angle de l’étouble,* *l’éteule
Les vaches alignées forment déjà la couble.
D’un geste, les charreux se tirent à l’écart
Une main sur la queue, prêts pour le départ.
Tout doux !Tout doux, MIGNONNE, en avant
la PARISE
CHARMANTE Ah !Ah ! Allons donc
la MARQUISE !
Le sol se révulse et glisse au versoir.
Les cailloux s’effaçant crissent de désespoir.
Un mulot qu’on surprend s’affole en courant.
Les racines inversées lèvent un doigt saignant.
Oh !Là ! Arevireu ! arré MARQUISE , arré ! * *on retourne
La charrue lentement tourne sur ses oreilles.
Les bêtes obéissantes vont retrouver la raie.
Le MAITRE encore enferre, et appuie, et surveille
Le faux-pas de la garce qui va dans le labour
Ou du roc qui d’un coup bloque dans un bruit sourd.
Et ainsi de sillon en sillon et sillon
Parsemé çà et là de quelques oisillons
Le champ couvert de plaies comme un long supplicié
Expose au vent de l’aube son dos de flagellé
Avant que ne surgisse triomphant du destin
La plantule ténue qui tarira la faim. 

Mon salon, à moi, de l’agriculture (4)

17 février 2011

 

Je t’ai vénérée blonde,
Aux cheveux très ras
Je t’ai aimée gironde
Au cou quelque peu gras
J’ai caressé tes flancs
En un délice extrême
Et puis d’un geste lent,
Comme on fait quand on aime
J’ai pincé doucement
Le bout de tes mamelles…
Dans tes yeux, en rêvant,
J’ai vu que tu es celle
Qui demain donnera
Le lait à  mes petits enfants
Si l’idiot de l’INRA
Ne t’assassine pas
O ma VILLARD DE LANS 

Mon salon, à moi, de l’agriculture (3)

17 février 2011

 

Adieu, douce MARQUISE, tu étais la plus belle
Adieu ma douce amie, adieu ma jouvencelle
Nous avons mille fois en parcourant les prés
Partagé mille joies, sauté mille fossés
Nous avons de concert écouté l’alouette
Ecouté le blé mûr bruisser sa chansonnette
Nous avons entendu tous les bruits de la terre.
Lorsqu’elle tourne en sillon sur le flanc et se serre
Nous avons bu ensemble à la même fontaine
J’ai caressé tes flancs, ton cou et ta bedaine
J’ai tiré doucement le lait de ta mamelle
Tu m’as lèché le front aussi, ma toute belle
Sous le joug tu venais dès que je t’appelais
Sans attendre un instant, sans rechigner jamais
Viens prendre dans ma main cette poignée de sel
Stérile est ton ventre et sèche ta mamelle
Et c’est la dure loi de notre société :
Quiconque est abattu, qui ne peut rapporter.
Adieu, MARQUISE, adieu, que dis-je ? à toujours
Tout au long de ma vie, redit avec amour
Ton nom vivra sans cesse
Ainsi qu’une caresse. 

Mon salon, à moi, de l’agriculture (2)

16 février 2011

 

Dès que tombe la nuit sur les plaines de France
S’élève une clameur, un appel de souffrance,
Et dans chaque village, au fond des cimetières
On entend se lever des ombres solitaires.
Ceux, pendant des lustres, qui sont restés sans voix
Se dressent , gueux et rustres, clament leur désarroi
Car la terre qu’ils ont, de leur sueur nourrie,
Est vouée par surplus, aux jachères pourries.
Alors, dans le silence de la nuit des humains
Ils retournent les tombes et surgissent soudain
Puisque les incapables habitants de la terre
Négligent un trésor que leur esprit vénère,
Puisqu’on laisse sans soins la glèbe nourricière
Malgré que des enfants périssent de misère
ILS IRONT tant gronde la révolte
Accomplir le travail de tous ces désinvoltes
Et l’on voit dans la nuit une armée d’ectoplasmes
Former une couvrée en forme de fantasme.
Feux follets, direz-vous ? Point du tout, mais des …âmes
Qui vont dans les ténèbres, en aiguisant leur lame
Afin que ne se perde le fruit de la nature
Rallumer le flambeau de notre agriculture. 

Mon salon, à moi, de l’agriculture (1)

16 février 2011

 

 De grands syndicalistes paysans ont largement oeuvré pour éradiquer leur espèce:
voici un siècle de paysannerie à travers la vie d’un des leurs en Vercors.
LE TOINE

L’avait six ans, le TOINE, quand le siècle a pris fin
Il gardait les moutons là-haut , dans la montagne,
Debout avant le jour, car le pain, ça se gagne
Et couché à la nuit dans un sommeil sans rêves,
L’a travaillé, le TOINE, sans arrêt et sans trêve.
A la vogue de LANS buvait bien son canon
Et il roulait parfois derrière les cuchons
Une fille bien douce avec des gros nichons.
L’était content, le TOINE, il était déjà grand
L’était pas bien causant…Pensait qu’après son temps,
Il reviendrait marier la bien jolie ROSINE
Qu’était encore trop jeune pour lui faire sa cuisine.
Un jour, il est parti, il n’avait que vingt ans
Une fleur au fusil et à la bouche un chant
Pour flanquer la râclée à tous les ALLEMANDS,
Pour rendre à la patrie ses provinces amputées
Que son maître à l’école coloriait en grisé.
L’était un bon soldat, le TOINE, avec NIVELLE,
Il a vu un beau jour sa jambe, en javelle,
Fauchée par un obus qu’on n’avait jamais vu…
On l’a soigné, le TOINE, l’était pas tout foutu. :
Avec une béquille, la jambe comme bois,
Il a pu revenir habiter près des bois.
La ROSINE était là, au jour de l’armistice,
Elle l’a regardé, a vu son sacrifice,
« POUR TRAVAILLER, dit-elle, IL FAUT QUELQU’UN D’ENTIER »
Il a voulu, le TOINE , s’acharner à montrer
Que malgré sa béquille Il pouvait travailler.
Il s’est levé, le TOINE, chaque jour à l’aurore,
Et il ne se couchait que quand la lune dort.
Il le fauchait, le foin, le fanait, le rentrait,
Enjavelait, liait, clochait*, rentrait, battait,
Comme si un beau jour, sur le CHEMIN DES DAMES
Il n’avait rien perdu, mais vous voyez le drame :
Car pour être admiré quand on vient de la guerre,
Il faut être un héros que l’on a mis en terre….
L’a bien pleuré, le TOINE, le jour où
la ROSINE
A épousé BERTRAND du fond de la ravine…
S’est calé un moment contre le mur de grange,
A bu un bon canon, a oublié qu’on mange,
Caressé
la PARISE,
la CHALAISE,
la CHARMANTE
Trait la chèvre, mis son veau sous
la FROMENTE.
Les malins du pays lui ont porté un saule…
Il a bu avec eux un bon litron de gnôle…
Et il a travaillé, le TOINE , travaillé,
Le dos un peu courbé, la jambe tiraillée.
Les années ont passé sans qu’il ait ralenti
Comme si besognant, il n’avait rien senti.
Les BOCHES ont reparu sur la scène des armes.
Il a rien dit, le TOINE, il a caché ses larmes.
Son destin de labeur, un ! deux ! clopin-clopant,
Il a continué en serrant bien les dents.
Il a vu les enfants sur le pont fusillés
Il a su les bébés sur les portes clouées
Il a appris les femmes par les chiens dévorées
Il a connu le feu, sur son foin allumé.
Mais il est courageux, le TOINE, vous pensez !
Ca fait plus de vingt ans qu’il travaille éclopé
Les malheurs du pays, les horreurs de la guerre
Et
la France vaincue patrie de la misère,
Ne sont rien comparés à la noire gangrène
Qui envahit l’esprit : ce n’est pas de la haine,
Non ! c’est solitude, dont les barreaux étroits
Etendent la prison, prison que nul ne voit.
A la reconstruction, mettre les bouchées doubles,
Il lui a bien fallu…Et en avant la couble* !
Du travail le matin et du travail le soir
Du travail chaque jour, ça tue le désespoir !
Y avait bien quelques fois quelque bartivelle*
Qui disait que des sous, il avait à la pelle.
Il disait rien, le TOINE, le TOINE,il travaillait.
Son pas était plus court, alors, il clopinait.
Comprenait pas, le TOINE, lui qui maniait la daille,
Les tracteurs, les lieuses, et la mode des jailles…        (vache pîes)
On lui a dit un jour où il perdait courage :
« Vous pourriez arrêter, faire place, à votre âge
A un jeune qui doit nourrir une famille.
Vos sous, vous les placez de peur qu’on ne les pille….
Voyons, que disions-nous ? Ah ! oui ! le FASASA*
A soixante-dix ans on peut bien avoir ça ! »
Il s’est planté, le TOINE , et il a regardé
Les parcs de barbelés, talus jamais fauchés.
Il s’est tu, le TOINE, il était pas causant…
Quelquefois, le matin, quand il était vaillant,
Il décrochait sa daille* et fauchait un moment….
Et puis il a vieilli, il a pris son parti
Des haies tellement larges qu’elles sont des taillis…
Et puis on a parlé, il a bien entendu
Que l’on parle partout de quotats, de surplus,
Il a vu son voisin qui jetait ,SACRILEGE,
Du lait à ses cochons,Quel était ce manège ?
On lui a annoncé depuis l’année dernière
Que ses champs sont choisis pour porter la jachère
Il s’est couché, le TOINE, sans un mot, tristement,
Il a traîné des mois ressassant, remâchant
Et puis un jour de juin, dans le soleil levant,
Il s’est dressé, le TOINE, comme un jeune fervent
Il a sorti sa faux enchaplée* de longtemps
Et puis s’est avancé, clopinant, clopinant,
Est entré dans le champ bien subrepticement
A donné un bon coup, un autre, et un troisième
A FAUCHE UN ENDAIN D’UNE LONGUEUR SUPREME
S’est penché doucement pour caresser le foin :
Le trèfle, l’éparsé, la fenasse : LE FOIN ! !
S’est couché brusquement sur le bord de l’endain
Et a lâché son âme
POUR NE PAS VOIR DEMAIN

*enchaplée=battue *daille=faux *FASASA= indemnité de départ
*bartivelle= pipelette *couble= plusieurs paires de vaches attelées
*clochait=dressait les gerbes pour les faire sécher 

Veillée d’autrefois en Vercors

16 février 2011

 

 

(et à Autrans en particulier)

Enfin, les seaux vidés, lavés après la traite,
Les râteliers bourrés, la quiétude des bêtes,
Ils ont pris leur manteau et se sont dirigés
Vers la ferme voisine pour passer la veillée.
Malgré le froid, la neige, la chaude atmosphère
Des voisins rassemblés au creux de la chaumière
Va réjouir le cœur le temps d’une soirée.
Les hommes ont pris place autour d’un jeu de cartes.
Les enfants agités se chamaillent et s’ébattent.
Le chien est dans un coin , allongé, d’un air las.
Les femmes ont sorti leur tricot du cabas.
« Vingt de trèfle, deux cents, quarante de binage »
On parle de la neige, des bêtes, du village
En énonçant les points, les annonces, les plis.
On tourne, on distribue, on discute des prix,
On raconte l’histoire mainte fois ressassée
De ce FRANCOIS CAILLAT qui faisait que passer.
On parle de magie et de vieux sortilèges
De sorciers dangereux en se tendant des pièges.
« Je coupe et je rejoue, à toi, prends si tu peux !…
Celle-là, le beau gosse, il en fait ce qu’il veut. »
Les femmes dans leur coin font trotter les aiguilles
En racontant entre elles des histoires de famille.
Et lorsque les enfants cessent d’être bruyants,
Sur une couverture, ils s’endorment un moment.
Sur le coup de dix heures, on s’ébroue quelque peu
On s’en va à l’étable pour inspecter les lieux.
Derrière chaque bête on se croit à la foire
C’est fou comme les vaches suscitent des histoires
Car la vue de chacune rappelle une anecdote
Souvenir de charrue , de foin, de blé, de botte.
On estime les poids, on jauge la rudesse,
On chante les louanges, on vante les prouesses.
On regarde les veaux qui croissent lentement,
On caresse les chèvres qui bêlent bruyamment
Et puis on s’en revient dans la chaude cuisine
Où la table est dressée. Poliment on fait mine
D’en être étonné, mais on s’assied bientôt
Pour ensemble souper :repas léger mais chaud,
Si chaud de l’amitié :un peu de saucisson,
De tomme, du pain gris, un morceau de jambon
Coupé le long de l’os, une pomme, une noix,
Un peu de confiture…Puis on croise les doigts
Sur le ventre repu…et puis on parle encore
De ceux qui ne sont plus, des vivants et des morts,
De ceux qu’on aime bien, de ceux que l’on redoute
Et de ce que l’on craint….
Retour au froid, ça coûte
Lors on retarde un peu le moment où rentrer
Dans la noirceur hantée, sur le chemin feutré
Par la neige amassée de la fraîche tempête.
Allons ! Debout ! Il faut finir la fête…
Pour se donner courage en marchant dans la nuit,
On chante une chanson oubliée aujourd’hui
Et l’on entend là-bas, loin dans l’obscurité
Des voix qui vous répondent, comme écho répété.
Malgré le froid, la neige, la chaude humanité
Rayonne dans le noir par les refrains portée.
Et c’est tout entouré de la communauté
Que l’on rejoint le toit depuis le soir quitté
Pour trouver, ô délice !Dans les bras de MORPHEE
Un bon sommeil de juste, de paix, et d’équité. 

Les lavandières de nuit

16 février 2011

Les lavoirs de chez nous ont tous disparu. Savez-vous qui, de tous les êtres en était le plus nostalgique ?
Quelques vieux attachés aux bonnes traditions ? Pas du tout ! Quelque vieille bartivelle privée de médisance ? Pas tout à fait !
Le plus peiné de tous, vous ne pourrez le croire, était bien le grand SATAN. Ecoutez mon histoire.
Pendant des millénaires, réunies au lavoir, toutes les langues arides, fourchues et venimeuses avaient pu comme à loisir se charger du péché de médisance et de calomnie.
Tout cela procurait au DIABLE qui jubilait la joie de renvoyer au lavoir chaque nuit les lavandières (sur le lieu où elles avaient médit.)
Mais depuis l’invention des lave-linge, plus question de trouver des clientes ici ! Plus question de les contraindre à blanchir un linge qu’en agitant sa queue dans le fond du bassin,il salissait à mesure de mille brins de boue et de mille souillures, ni, bien sûr de pouvoir, au matin reprocher aux laveuses les vertes et noires traces sur le tissu sali…Plus question, non plus, de les voir se ruer à grands coups de battoir sur le pauvre égaré qui aurait pu les voir…Et les traîner ensuite à grandes smaquées de lanières brûlantes jusqu’au fond de l’enfer aux marmites bouillantes !Ah !SATAN en voulait aux « VEDETTES »!
C’est alors qu’il a eu une belle inspiration : laisser trouver aux SAVANTS une invention subtile.Il a d’abord aidé un certain BELL GRAHAM à créer pour médire un certain téléphone…qui noircit bien des âmes…Puis, la moisson n’étant pas assez importante, alors qu’a-t-il fait ? Il a , et la chose est patente, masturbé un moment le cerveau de BRANLY pour lui intégrer l’idée de la radio.
C’est ainsi que depuis, on ne voit plus jamais de lavandières de nuit, mais que tous les menteurs des journaux, des radios, des télés, passent après trépas leurs nuits de purgatoire à hurler en silence de vraies vérités vraies devant de faux micros.

Le coffre fort du Maire

16 février 2011

 ….prenez garde! le diable peut prendre diverses formes!!!!
Monsieur le maire rentrait d’une séance houleuse de son conseil municipal…
La nuit était tombée,les lumières éteintes, le tonnerre grondait de ravin en ravin…Monsieur le maire roulait très lentement sur la route mouillée.Ses essuie-glace frottaient :uneeeee deux ! uneeee deux !Les phares clignotaient au gré des nids de poules….quand, soudain, en travers, au milieu de la route, monsieur le MAIRE vit un énorme coffre-fort…Pas moyen de passer :il faut le
déplacer !
Monsieur le maire , malgré l’averse comme vache qui pisse sort de la voiture et touche l’obstacle……..Le coffre diminue au contact de sa main ! Il devient minuscule pareil à un écrin. Alors, monsieur le maire lâche cet objet qui aussitôt reforme un barrage énorme, cependant que la foudre éclate à ses pieds et que la pluie ruisselle en un torrent de boue…Il se frotte les yeux, il se penche à nouveau…Le coffre redevient coffret comme à bijoux….Alors, monsieur le maire prend au creux de sa main la boîte minuscule et la dépose à son tableau de bord.
Arrivant chez lui, le sommeil lui est rare : un tout petit coffret vient hanter sa mémoire….
Et si bien que, minuit sonnant, il enfile un peignoir, prend l’objet, le tourne et le retourne, aperçoit une fente, introduit une lame…le couvercle bondit comme mu par ressorts, et maints petits démons prennent place à sa table en arborant forme humaine, s’asseyent près de lui, le caressent et le baisent.
« Je suis le diable des forêts, si tu me fais xxxxx (voix basse) ?????, tu auras sois-en sûr une belle récompense !
_Je suis le diable routinier, et je viens, c’est urgent faire un petit projet de sente dans les bois je reste ton sujet ….(voix basse) ?????????
_Je suis le diable à langue venimeuse, si tu ne fais pas de route pour mon ??????? il t’en cuira rudement.
_Je suis le diable des scieries, je veux du bon bois blanc , je me veux enrichi, pour charger mes grumiers ouvre-moi un sentier vitement.
_Je suis le diable aux skis, j’ai besoin d’une piste
_Je suis le diable parapentiste, avec mon quatre-quatre je veux sur les sommets pouvoir enfin m’ébattre.
_Je suis le diable promeneur, avec ma B.M. je veux accéder jusqu’aux sources que j’aime.
_Nous sommes tous les diables des routes forestières et si tu veux dormir, laisse-nous les construire. »
Monsieur le maire alors écoute ces bizarres humains tellement empressés, tellement cajoleurs.
Mais voilà que surgit et pour faire bonne mesure le diable leriaton à plume sépulture.
« Je suis, sois en bien sûr, ton bon ange gardien, alors écoute-moi, garde ton esprit pur, signe ce parchemin, le chemin sera fait. »
C’est ainsi messieurs-dames, qu’un jour dans la montagne, surgit en une nuit une route de hargne, arrachant tous les arbres et écorchant les pentes, coupant toutes les sentes ébranlant les abris afin que des grumiers dans le temps d’une année puissent dévaliser la forêt mutilée…et que des inactifs puissent, sans se fatiguer, bien se divertir, sans se soucier de rien.

L’étable ensorcelée

16 février 2011

Le GUSTIN était désolé : toutes ses vaches s’étaient mises à crever.
Tout avait commencé ce soir du premier décembre où
la MIGNONNE avait fait deux veaux…Il fallait bien les loger , ces veaux !…Alors, il avait renvoyé son domestique qu’il ne savait plus où faire coucher. Oh ! L’autre s’était bien rebiffé, il avait dit qu’il se vengerait.
Le soir même,
la PILOUNE , la belle PILOUNE, la plus gentille, la plus belle, la plus grasse se tordait de douleur…Il l’avait bouchonnée, lui avait fait boire du vin chaud sucré, mais, rien à faire ! Le lendemain, il l’avait trouvée étirée dans le terret,* la langue baveuse et l’œil vitreux…
Elle était grosse,
la PILOUNE, au moins 800 kilos. Il lui avait fallu lier quatre autres vaches pour la traîner dans le champ où l’enterrer !…Et creuser dans la neige et dans le sol gelé, un trou assez grand pour la faire disparaître, ce n’est pas une sinécure, je vous prie de le croire !
Trois jours plus tard, c’était
la PARISE, pourtant fraîche de lait qui paraissait tarie. Elle avait l’œil brillant, le naseau sec et chaud. Elle était malade et rien à faire pour la soigner ! Le vétérinaire mandé avait bien fait une piqûre…Le soir, elle était crevée. Quelle guigne ! !
La GUSTINE aussitôt avait compris ce qui se passait : « T’aurais pas dû, je te dis, le jeter à la porte ! Il a dit qu’il se vengerait…ça peut-être que lui !…Essaye de le trouver, fais-lui des excuses…tu peux bien le loger, maintenant ! »
Mais le GUSTIN était têtu : « J’ai encore moins besoin d’un valet aujourd’hui qu’hier, et comment je le payerais, hein ? …Creuser un nouveau trou ça fait vraiment beaucoup !…
Si je demandais à MARIUS de m’aider, ça irait peut-être mieux !
_Le MARIUS !Se récria
la GUSTINE, après la raclée que tu lui as donnée le jour de la foire où tu n’étais pas rentré et où il était venu m’aider à traire ! Tu penses comme il va t’aider ! »
Alors, le GUSTIN s’est remis à creuser….et à manier la pioche vous savez le picareau*, ça vous remue les méninges et ça vous aide à penser.
« Il a ensorcelé mes vaches ! » comme un trait de lumière l’idée s’est inscrite dans son cerveau.
« Ah ! Tu parles au diable ! Ben moi je vais te parler du BON DIEU »…Et voilà le GUSTIN qui vous plante un clou sur chaque porte de l’étable et accroche à chacun un crucifix.
« ARRIERE SATAN, ICI ON CROIT EN DIEU »
Mais, le lendemain, les crucifix étaient par terre, brisés…pourtant, les clous étaient solides !…
Alors, il est parti, le GUSTIN, chercher de l’eau bénite. Il en a mis quelques gouttes dans le bassin des bêtes, il en a frotté le dos de chacune…mais la petite FROMENTE paraissait mal à l’aise…
« Ah ! NON ! PAS CELLE-LA ! c’est celle que je préfère, ma meilleure bauille* ! »…Mais le soir,
la FROMENTE se tordait. Le vétérinaire mandé d’urgence en perdait son latin : « Je n’y comprends rien !…Il faudrait analyser votre fourrage…
_Allons donc ! Elles sont ensorcelées, voilà ce qu’elles ont » répétait
la GUSTINE.
Et d’un troisième trou en moins d’un mois, ça fait beaucoup…
Le dimanche,
la GUSTINE se rendit compte que les voisins lui faisaient grise mine…Eh ! oui ! que voulez-vous ! fréquenter quelqu’un dont l’étable est ensorcelée, on ne sait pas ce que cela peut vous apporter…
Alors
la GUSTINE a demandé au curé d’exorciser l’étable….
La cérémonie a bien duré toute la journée du lundi.
Le mardi soir, veille de Noël, le grand-père est venu. Il était de RENCUREL s’y connaissait en vaches, et, des vaches qui crèvent…c’était bien le diable ! ! !
Il s’est assis, le pépé, dans le noir, dans un coin de l’étable pendant que tous les autres étaient à la messe de minuit, et il a regardé ce qui se passait.
C’est alors qu’il l’a vu LUI, LE MALIN, LE DIABLE, QUOI ! ! ! Il a vu ce vaurien de fils du voisin donner du vitriol à
la JAILLE, qui s’est mise à se tordre !
Que voulez-vous, messieurs-dames, à l’époque, on ne pouvait pas espérer qu’un plan MANSCHOLT ou un gouvernement ou une loi d’orientation agricole , une politique agricole commune, puissent un jour ruiner votre voisin afin de pouvoir lui rafler ses terres….On était bien obligé de se débrouiller soi- même ! ! !

*bauille= génisse *picareau= pioche-pic *terret= fossé réservé au fumier 

Attention au Malin!

16 février 2011

Il y avait autrefois, à l’entrée des gorges d……… un homme capable de régler tous les problèmes de ses contemporains.
On allait le trouver dans les cas désespérés et aussi dans ceux que la justice ne réussissait pas à régler.
Un homme voulait-il se venger de sa femme qui, lasse de son ivrognerie avait suivi le fringant commis qu’il avait embauché pour l’aider ? Moyennant quelques pièces sonnantes et trébuchantes, un char se renversait sur l’impudent , l’estropiant, ou un chien enragé venait lui dévorer ses bijoux de famille.
Un autre convoitait-il la ferme de son vieux voisin ? Des âmes mystérieuses y allaient faire charivari.
Une épouse voulait-elle rendre un peu plus vaillant celui que ses parents lui avaient octroyé pour mari ? Son vin se trouvait comme par magie transformé en un philtre distillant l’ardeur.
Des héritiers voulaient-ils entrer enfin en possession des biens de leur grand-oncle à la longévité un peu trop assurée. Un malencontreux rocher se détachait sous les pieds de l’ancêtre entêté !
Ah ! mais pour consulter, il fallait être décidé, ne pas un seul instant accepter d’hésiter.

Voilà qu’un jour, le Juste, voulait se venger de son voisin qui sans arrêt lui volait ses poulets…Il va voir le sorcier qui lui fait préciser puisqu’il veut le châtier, de quel ordre la peine….Le Juste a bien hésité : il était brave homme….quand même pas la mort, non ! Une bonne râclée ! …
Le sorcier l’a fermé dans une pièce noire et lui a demandé de frapper de son fouet l’homme que, disait-il, il ne tarderait pas à voir…Le Juste a vu une ombre qui glissait dans le noir…mais pouvait-il frapper ainsi sans bien savoir ?…Etre sûr d’être juste…Il a donc hésité une courte seconde…le temps de voir surgir devant lui un géant qui lui a lacéré les côtes pour longtemps.
Si tu vas au sorcier, que ta haine soit forte ! car SATAN qui le guide ne peut c’est bien certain s’embarrasser de gens coupables d’hésitation ou de regrets. 

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