radotage Le sapin orgueilleux (quinzaine du conte)

 

Il y a bien longtemps, au temps où les montagnes et les plantes parlaient, le CORNAFION et
la MOUCHEROLLE flirtaient beaucoup. 

On pouvait voir le CORNAFION caresser doucement du bout de ses doigts le cou de la   MOUCHEROLLE, entourer ses épaules de son bras. Tous deux s’étaient pris d’affection pour la végétation qui croissait dans la vallée à leurs pieds. Mais, parmi tous les arbres, ils avaient un préféré : c’était un petit sapin mignon tout vert et brillant qui tendait vers le ciel une longue flèche… 

Ils n’en finissaient pas, le CORNAFION et
la MOUCHEROLLE de l’admirer, de lui faire compliment sur sa beauté, sur sa vigueur…si bien que, peu à peu, le sapin qui se développait beaucoup mieux que les autres (il était placé tout près de FONT-FROIDE, la source qui l’abreuvait et bien à l’abri des vents qui auraient pu le déranger.) conçut un orgueil démesuré. 

« Je suis le plus beau des petits sapins ! » 

Ne te vante pas disait le Cornafion 

_Laisse-le dire ! il est petit répondait
la Moucherolle. 

« Je suis le plus fort de tous » (et il donnait des coups de branches aux voisins 

_C’est mal de battre les autres  grondait Le Cornafion 

_Laisse-le jouer protestait
La Moucherolle 

« C’est moi qui grandis le plus vite ! » 

_ Tu devrais grandir en sagesse et arrêter de rouler des mécaniques, disait Le Cornafion 

_Il faut bien que jeunesse se passe répondait
La Moucherolle. 

« Je suis le plus vert de toute la forêt ! » 

Le CORNAFION ne cessait pas de lui dire d’éviter de se vanter, mais,
la MOUCHEROLLE lui trouvait toujours des excuses. Quand le CORNAFION fronçait les sourcils,
la MOUCHEROLLE, plus indulgente haussait les épaules…il s’ensuivait de petits éboulements sans conséquences. Un jour, cependant, le sapin réussit à atteindre une hauteur colossale : en se haussant sur la pointe de ses racines, il voyait par-dessus la tête du CORNAFION.Son orgueil n’en fut que plus immodéré. 

« Je suis plus grand que tous les êtres de la montagne ! Je suis bien plus grand et plus beau que la montagne elle-même ! Et, en plus, je suis du plus beau vert ! Ne regardez pas ce sévère CORNAFION qui fronce toujours les sourcils, regardez-moi ! Je suis vraiment le plus beau ! » 

Alors, le CORNAFION se mit en colère.
La MOUCHEROLLE essayait bien de le calmer, mais à chaque remarque de l’orgueilleux sapin il tremblait de fureur…et des rochers roulaient au bas des pentes….Un jour où les remarques avaient été encore plus cruelles que d’habitude, le CORNAFION  entra dans une fureur terrible.
La MOUCHEROLLE  lui dit : « Ne te mets pas en colère comme ça ! Tu vas faire une crise cardiaque ! 

_Tu prends sa défense alors qu’il se moque de moi ! » hurla le CORNAFION en retirant brutalement son bras qui entourait le cou de
la MOUCHEROLLE. Cela fit un énorme fracas dans la montagne, des rochers roulèrent jusqu’aux VIERES. Le COL VERT était né. 

Au début de l’hiver, le vent se mit à souffler : il était libre, maintenant, le vent, plus rien ne l’arrêtait, il pouvait se glisser dans le COL VERT. 

Le sapin, si sûr de sa force et de sa beauté ne se méfiait pas…Il prenait même un malin plaisir à ne s’agripper nulle part. 

« Ca me rafraîchit ! Ca me berce ! Je n’ai pas peur de toi, le vent ! » 

Si bien qu’une rafale un peu plus violente que les autres le coucha brutalement dans un fracas épouvantable…En tombant, sa tête heurta le bras droit du CORNAFION qui s’abaissa à son tour…C’est ainsi que naquit LE COL DE L’ARC. 

Et depuis ce temps, jamais le CORNAFION n’a procuré un quelconque abri au moindre sapin : qu’ils se débrouillent tout seuls pour résister au vent ! Il ne parle plus jamais à
la MOUCHEROLLE ils ont tous deux durci leur cœur qui est devenu aussi dur que du béton ou de la pierre. …et jamais plus ils n’ont admiré un arbre quelconque !

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