Il y a des milliers d’années
Par naturelle sélection fatidique
Le sapin d’Europe fut chassé
Trouva refuge aux Amériques.
Ayant eu écho de ce glas
Un certain Mister Douglas
Le ramena il y a cent ans.
L’arbre prit sa revanche, innocemment.
Les petits sorciers de chez nous,
Qui réintroduisent le loup,
Sont pour ,les sapins, justement,
Ceux qui s’affolent maintenant.
Au lieu de priser honnêtement
Cette verdure de tous temps,
Ils crient « Haro! Envahissement ».
Ils n’aiment pas les sapins
Ils détestent ce qui fait fête
Ce sont de tristes ascètes
Qui, en fait, haïssent l’humain.
xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
Le vieux sapin
Le vieux sapin, cœur de bosquet,
Abrite bien dans le secret
Les rencontres enflammées
Des amants dans le fourré
Le tapis de fines aiguilles
Forme un épais matelas
Qui chatouille et titille
Chaque peau qui s’étend là
Le tronc rugueux est le complice
Involontaire mais zélé
De jeux que certains ont dit vice
Liens serrés, dos flagellé
C’est là que coq de basse cour
Quand certaines oies approchent
Sous prétexte de l’amour
Leur fait découvrir la broche
Et quoique râlent les jaloux
Jeunes gamines pucelles
Mamans pulpeuses et haridelles
Pour son plaisir se prêtent à tout
Comme papillons à la flamme
Tournoient pour se cramer les ailes
Les femmes ont au fond leur âme
De la victime une étincelle.
xxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxxx
Le sapin orgueilleux
Il y a bien longtemps, au temps où les montagnes et les plantes parlaient, le CORNAFION et
la MOUCHEROLLE flirtaient beaucoup.
On pouvait voir le CORNAFION caresser doucement du bout de ses doigts le cou de la MOUCHEROLLE, entourer ses épaules de son bras. Tous deux s’étaient pris d’affection pour la végétation qui croissait dans la vallée à leurs pieds. Mais, parmi tous les arbres, ils avaient un préféré : c’était un petit sapin mignon tout vert et brillant qui tendait vers le ciel une longue flèche…
Ils n’en finissaient pas, le CORNAFION et
la MOUCHEROLLE de l’admirer, de lui faire compliment sur sa beauté, sur sa vigueur…si bien que, peu à peu, le sapin qui se développait beaucoup mieux que les autres (il était placé tout près de FONT-FROIDE, la source qui l’abreuvait et bien à l’abri des vents qui auraient pu le déranger.) conçut un orgueil démesuré.
« Je suis le plus beau des petits sapins ! »
Ne te vante pas disait le Cornafion
_Laisse-le dire ! il est petit répondait
la Moucherolle.
« Je suis le plus fort de tous » (et il donnait des coups de branches aux voisins
_C’est mal de battre les autres grondait Le Cornafion
_Laisse-le jouer protestait
La Moucherolle
« C’est moi qui grandis le plus vite ! »
_ Tu devrais grandir en sagesse et arrêter de rouler des mécaniques, disait Le Cornafion
_Il faut bien que jeunesse se passe répondait
La Moucherolle.
« Je suis le plus vert de toute la forêt ! »
Le CORNAFION ne cessait pas de lui dire d’éviter de se vanter, mais,
la MOUCHEROLLE lui trouvait toujours des excuses. Quand le CORNAFION fronçait les sourcils,
la MOUCHEROLLE, plus indulgente haussait les épaules…il s’ensuivait de petits éboulements sans conséquences. Un jour, cependant, le sapin réussit à atteindre une hauteur colossale : en se haussant sur la pointe de ses racines, il voyait par-dessus la tête du CORNAFION.Son orgueil n’en fut que plus immodéré.
« Je suis plus grand que tous les êtres de la montagne ! Je suis bien plus grand et plus beau que la montagne elle-même ! Et, en plus, je suis du plus beau vert ! Ne regardez pas ce sévère CORNAFION qui fronce toujours les sourcils, regardez-moi ! Je suis vraiment le plus beau ! »
Alors, le CORNAFION se mit en colère.
La MOUCHEROLLE essayait bien de le calmer, mais à chaque remarque de l’orgueilleux sapin il tremblait de fureur…et des rochers roulaient au bas des pentes….Un jour où les remarques avaient été encore plus cruelles que d’habitude, le CORNAFION entra dans une fureur terrible.
La MOUCHEROLLE lui dit : « Ne te mets pas en colère comme ça ! Tu vas faire une crise cardiaque !
_Tu prends sa défense alors qu’il se moque de moi ! » hurla le CORNAFION en retirant brutalement son bras qui entourait le cou de
la MOUCHEROLLE. Cela fit un énorme fracas dans la montagne, des rochers roulèrent jusqu’aux VIERES. Le COL VERT était né.
Au début de l’hiver, le vent se mit à souffler : il était libre, maintenant, le vent, plus rien ne l’arrêtait, il pouvait se glisser dans le COL VERT.
Le sapin, si sûr de sa force et de sa beauté ne se méfiait pas…Il prenait même un malin plaisir à ne s’agripper nulle part.
« Ca me rafraîchit ! Ca me berce ! Je n’ai pas peur de toi, le vent ! »
Si bien qu’une rafale un peu plus violente que les autres le coucha brutalement dans un fracas épouvantable…En tombant, sa tête heurta le bras droit du CORNAFION qui s’abaissa à son tour…C’est ainsi que naquit LE COL DE L’ARC.
Et depuis ce temps, jamais le CORNAFION n’a procuré un quelconque abri au moindre sapin : qu’ils se débrouillent tout seuls pour résister au vent ! Il ne parle plus jamais à
la MOUCHEROLLE ils ont tous deux durci leur cœur qui est devenu aussi dur que du béton ou de la pierre. …et jamais plus ils n’ont admiré un arbre quelconque !
Mon beau sapin, roi des forêts… (même les rois finissent par tomber)
De belles histoires qui finissent toutes par sentir le sapin…
Fabrice
Très juste!