Quand Jean et Martine rentrèrent de vacances , ce 27 juillet, une surprise les attendait.
Comme à son habitude, Jean avait garé la voiture devant la porte de la maison. Son fils Hubert, n’était pas parti avec eux : il était grand et avait trouvé un travail d’été dans les vergers du village voisin. Les journées de cueillette étaient longues, il ne rentrerait qu’à la nuit.
Jean ouvrit la porte de la maison (il était plus prudent de jeter un coup d’œil : un jeune seul pendant les vacances, ça ne pense pas forcément au ménage, et il ne voulait pas avoir à soigner une apoplexie devant un « foutoir indescriptible »… Rien ne lui sauta d’abord aux yeux. Martine, entrant sur ses talons jeta son habituel « quelle pagaille ! » et se bloqua net : il y avait DEUX télés !!! Et… Un magnétoscope qu’elle ne connaissait pas… Des disques, des livres…Jean à son tour (il avait regardé le sol et pas les meubles) se figea. Il se glissa au garage : des meubles, des cartons, un vrai déménagement. …
Jean, toujours pessimiste imagina tout de suite Hubert complice d’un cambrioleur qui aurait profité de sa notoriété pour cacher des objets volés. Sait-on avec qui il a pu faire connaissance ces quinze jours : les saisonniers de cueillette, il y a de tous spécimens, et Hubert est encore jeune, influençable peut-être…
Martine riposta aussitôt : « Hubert ne se compromettrait jamais avec des malfaiteurs ! Il y a une explication, attendons-le ». Jean serait volontiers sur l’instant aller tirer son fils de son travail pour l’amener par les oreilles expliquer ce genre d’amoncellement d’objets qui ne lui appartenaient pas.
« Laisse-le rentrer disait Martine, ne casse pas son emploi ! »
Il n’était que dix-sept heures, Hubert rentrerait vers vingt heures au moins…
Ils ne savaient plus quoi faire, ils restaient là, tétanisés.
Non ! Pas de traces d’effraction sur les portes : Hubert a donc bien ouvert la porte…
« Non ! On ne peut pas décharger les valises, tant pis, on va faire les provisions, il ne doit pas rester grand-chose dans les placards… »
Les voilà donc partis, perturbés, inquiets pour l’hypermarché à dix kilomètres de là : fouiller, réfléchir à ce qui peut être nécessaire, cela détourne les idées….Pour prolonger un peu Martine propose de boire un verre dans la galerie marchande, mais il faut rentrer, être là pour savoir tout de suite ce qu’Hubert a bien pu faire.
Hubert était là à leur retour, un peu surpris : il ne pensait pas qu’ils rentreraient aussi tôt…
Bondissant hors de la voiture comme un diable hors de sa boite, Jean se rua sur son fils « Qu’est-ce que tu as fait ? TU AS TRANSFORME NOTRE MAISON EN REPAIRE D’ALI BABA ?
_ Non ! Pourquoi ? Répond Hubert interloqué par cette attaque.
_ ET ALORS, CES MEUBLES ? CETTE TELE ? CE MAGNETOSCOPE ?
_ Ah ! Ca ? Mais ce n’est rien : ce sont les meubles de Gilbert. Il a quitté son appartement à cause de travaux urgents que fait réaliser son propriétaire. En attendant, il ne peut pas les déposer chez son père : depuis qu’il est majeur, il est prié de se débrouiller tout seul, son père et sa belle-mère ne sont pas là et il n’a pas les clés de leur maison.
Jean connaissait ce monsieur un peu bizarre, dont les enfants avaient été confiés d’abord à la mère qu’il avait abandonnée pour épouser une nonne défroquée, puis, quelques années plus tard, les avait accueillis après la mort de leur mère. Les jeunes avaient changé de foyer, adolescents, rebelles à une autorité qu’ils refusaient de reconnaître… Drôle de famille.
_ Mais alors, Gilbert, où dort-il ?
_ Dans sa voiture en attendant un studio qui ne sera libre que le mois prochain.
_ Dans sa voiture !
_ Oui, je lui ai proposé le matelas pneumatique dans ma chambre, mais il a refusé, c’est tout juste s’il a accepté de venir prendre une douche de temps en temps.
Jean respira, il était fier de son fils. Certes, il s’en voulait un peu d’avoir douté.
_ Va le chercher ! Nous allons tous les quatre au restaurant ce soir ! Décréta-t-il. »